« Il faut retrousser les manches et travailler pour participer à la réalisation de l'autoroute Est-Ouest». En visite, hier, à Oran, le ministre des Travaux publics, Amar Ghoul, a appelé les travailleurs algériens à prendre des postes dans le projet de réalisation de l'autoroute Est-Ouest. «Il faut que les travailleurs algériens s'adaptent à la mentalité des grands groupes étrangers. Le temps de travailler deux heures par jour est parti et terminé, il faut s'adapter aux méthodes de travail chinoises», a plaidé le ministre des Travaux publics. Le groupement chinois CITIC-CRCC, chargé de réaliser les lots centre et ouest de l'autoroute, a proposé au gouvernement de réaliser l'autoroute en 35 mois, mais avec de la main-d'oeuvre chinoise uniquement. «Cette proposition a choqué le gouvernement», reconnaît Hu Dongyi, directeur général du groupement CITIC-CRCC. Interrogé par le Quotidien d'Oran sur l'importation massive de la main-d'oeuvre chinoise, Amar Ghoul a répondu: «Nous nous sommes entendus avec le groupement chinois sur des quotas: 30% de Chinois et 70% de locaux. Nous avons négocié ces quotas et on ne compte pas les revoir. L'enjeu est capital pour l'Algérie. Ce projet gigantesque, une fois achevé, va nous permettre de disposer d'un grand réservoir de compétences dans les métiers liés à la réalisation d'une autoroute aux normes internationales. Les gens qui vont travailler sur ce projet auront une belle carte de visite. Ils pourront aller travailler là où ils veulent. Ce projet est une véritable école à ciel ouvert». La balle est dans le camp algérien.
Le ministre des Travaux publics ne veut pas seulement l'achèvement du projet dans les délais, mais surtout la formation du personnel algérien, base d'un transfert du savoir-faire chinois vers notre pays et ses entreprises. Ce qui va permettre à l'Algérie d'acquérir une expérience dans la réalisation des autoroutes, en prévision du lancement de nouveaux grands projets comme l'autoroute des Hauts Plateaux. L'enjeu est de taille. La Chine conditionne l'accès à son vaste marché aux compagnies étrangères par le transfert du savoir-faire et l'Algérie veut l'imiter.
L'Algérie n'a pas le milliard et plus de consommateurs, mais des dollars, grâce au pétrole et des projets gigantesques comme l'autoroute, les barrages, les stades de football, les chemins de fer, le transfert des eaux... Après une tournée nationale, le ministre des Travaux publics avoue sa satisfaction sur l'avancement des travaux. A Oran, Amar Ghoul a relevé que le groupement chinois CITIC-CRCC a déjà gagné trois précieux mois sur le délai total de 40 mois. Il a félicité les walis pour leur travail à lever les différents obstacles avant le démarrage effectif des travaux. Le ministre des Travaux publics sillonne le pays pour éviter que l'autoroute tombe dans les mailles du filet de notre bureaucratie tatillonne.
Amar Ghoul met en garde contre un tel scénario qui se paiera cash, en monnaie forte : «il ne faut pas donner l'occasion à l'entreprise de justifier un quelconque retard par des problèmes administratifs. Il faut régler tous les problèmes susceptibles de retarder le démarrage du projet». En fait, le gouvernement veut éviter la répétition du scénario du logement, avec l'AADL, où les groupes chinois n'ont pas respecté les délais de réalisation. Face à un géant comme le groupement CITIC-CRCC, tout obstacle administratif peut conduire à un glissement sur le délai de réalisation, avec son lot de pénalités pour l'économie nationale. Le gouvernement veut éviter l'arrivée massive des travailleurs chinois et leur installation en Algérie après la fin des travaux. On l'a vu dans le logement : beaucoup de travailleurs chinois ont préféré s'établir en Algérie, ouvrir des boutiques de vêtements, travailler dans le bâtiment avec des privés et des particuliers à la recherche d'une main-d'oeuvre bon marché et qualifiée. Le directeur du groupement CITIC-CRCC trouve dans l'autoroute un moyen pour renforcer l'amitié sino-algérienne. Diplomate, ce jeune chinois qui ne parle pas français, promet qu'il n'y aura aucun manquement aux délais. Son discours est à la hauteur de la dimension internationale des entreprises qui forment son groupement. «Nous ferons l'impossible pour que le peuple algérien soit satisfait de notre travail.
Nous attendons l'ordre du maître de l'ouvrage pour entamer les travaux», a dit M. Hu. Le groupement chinois ne compte pas se contenter de la réalisation. Il compte ramener avec lui des experts agricoles pour la formation de techniciens dans le boisement et les nouvelles techniques agricoles.
Il va également apporter son savoir-faire dans l'économie de l'eau pour approvisionner en eau potable les travailleurs qui interviendront dans la réalisation de l'autoroute.
Un peu distancés par le japonais Cojal chargé du lot est, les Chinois préfèrent plutôt parler de la fin des travaux. «Les Japonais sont en avance, mais l'essentiel, c'est de terminer dans les délais». Les deux géants asiatiques s'apprêtent à livrer une grande bataille d'image et d'efficacité en Algérie qui veut faire jouer à fond la concurrence.
Lun 12 Mar - 22:46