C’est dans le sillage de l’ouverture politique que la parabole s’est imposée en Algérie. Friands d’informations, les Algériens se sont alors rabattus sur les chaînes étrangères. Le génie algérien aidant, une nouvelle race de techniciens voit le jour : les installateurs de réseaux de paraboles collectives. C’est ainsi que les Algériens ont pu s’ouvrir sur le monde dès le début des années 1990, boudant de plus en plus les programmes de l’Unique. Tous les foyers se connectèrent au réseau collectif quand bien même cela coûtait 5 000 DA environ dans le temps. L’avènement de la révolution numérique transforme alors carrément la vie des Algériens qui s’équipent désormais en résolutions paraboliques individuelles : des milliers de chaînes de télévision entrent ainsi dans les foyers. Des magasins spécialisés dans le flashage des récepteurs se multiplient à une cadence vertigineuse, ce qui met les solutions de piratage à la portée de tout le monde. C’est alors la guerre entre les fournisseurs de bouquets et les hackers qui mettent, sitôt trouvées, leurs solutions de piratage sur Internet. Quand les fournisseurs décident de mieux sécuriser leurs sites, de nouveaux récepteurs voient le jour et l’Algérien, décidé à voir les programmes étrangers, n’hésite pas à acheter un autre démo chaque fois que l’ancien devient obsolète. Pour suivre les programmes des chaînes étrangères, l’Algérien est prêt à tous les sacrifices financiers.
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[size=7]La facilité de piratage des récepteurs des satellites de télévision a créé un véritable phénomène de “télémania” chez les Algériens boudant par là même les programmes de la chaîne nationale. Cet engouement pour les chaînes étrangères a provoqué aussi l’explosion du marché des paraboles et des démos au grand bonheur des importateurs dans un premier temps. Appâtés, en effet, par les avantages fiscaux, certains importateurs ont réalisé des unités de montage en Algérie avant que certains d’entre eux n’osent franchir le Rubicon de la véritable industrie électronique. Ce créneau a connu alors ses plus beaux jours avant que les fournisseurs des programmes de télévisions par satellites (Astra et TPS) décident de verrouiller de manière hermétique l’accès aux chaînes étrangères. Cela a sonné le glas pour de nombreux industriels du secteur, mais ceux qui ont su réagir à temps ont tout de même pu non seulement survivre, mais surtout se développer en maîtrisant carrément la technologie. À Bordj Bou-Arréridj, la “Silicon Valley” algérienne, des entreprises locales continuent à fabriquer des récepteurs numériques et des téléviseurs. Rien ne prédisposait pourtant cette localité, érigée en wilaya depuis peu, à devenir le fer de lance de l’industrie électronique en Algérie. Les importateurs des produits électroniques originaires de la région sont nombreux, c’est ce qui a aidé à l’émergence des premiers assembleurs dans la vallée des Bibans. Aujourd’hui, Bordj Bou-Arréridj, région agricole par excellence, se hisse au rang de capitale de l’électronique en Algérie. Les producteurs locaux ne cessent d’augmenter les taux d’intégration tout en améliorant la qualité de leurs appareils qu’ils ne cessent d’ailleurs de perfectionner. C’est le cas, notamment du groupe Cristor qui vient de réaliser la prouesse de fabriquer un démo entièrement avec les moyens locaux. Certes, certaines pièces sont importées, mais la nouveauté, c’est la capacité du bureau développement de ce groupe qui a pu mettre au point sa propre solution soft pour le dernier modèle de récepteur satellite. Jusqu’à présent, en plus de l’importation des pièces détachées, les fabricants de démos devaient aussi importer les solutions soft, à savoir le programme informatique qui permet toutes les commandes de l’appareil. “Nous avons développé un récepteur numérique entièrement algérien. C’est une première en Afrique et dans le monde arabe. Notre démo accepte 9 systèmes de carte. Cela est rare même de par le monde. Par ailleurs, il est stable, performant et ses mises à jour sont simples”, affirme Yacine Rahmani, ingénieur en architecture des ordinateurs et membre du bureau développement de Cristor. Un autre ingénieur du même bureau, Nasredine Houama, tient à préciser que développer une solution soft pour un démo n’est pas une mince affaire. “C’est une grande prouesse, réussie après trois ans d’âpres recherches. Désormais, nous pouvons dire que nous maîtrisons la fabrication des démos sur tous les plans”, affirme ce même ingénieur. Cela conduit Belkacem Amokrane, chargé des relations internationales du groupe Cristor, à se considérer au même niveau que le fabricant européen ou asiatique. “Pour parvenir à une autonomie industrielle, le seul moyen reste de développer des solutions soft. Par ailleurs, nous assurons un important taux d’intégration en matière de fabrication, vu que nous n’importons que la carte mère nue et nous procédons sur place à l’insertion de toutes les pièces, y compris celles mesurant quelques millimètres et ce, grâce aux machines modernes que nous avons acquises. Cela nous a permis d’exporter en Europe notre dernier produit, le démo le M2S qui est très demandé”, affirme M. Amokrane. Le groupe exporte, par ailleurs, régulièrement ses produits vers la Tunisie et la Libye. Le même interlocuteur se félicite des résultats obtenus lors de la dernière foire des produits électronique (Cobsat) à Dubaï où des représentants de plusieurs pays arabes ont montré leur intérêt pour les produits Cristor. Sur un autre registre, le même groupe fabrique des téléviseurs à tube cathodique et maîtrise aussi la production de téléviseurs à cristaux liquides et plasma. “Pour le moment, nous fabriquons des téléviseurs à tube cathodique de toutes dimensions avec des écran plats et bombés. Nous fabriquons aussi, et à la commande, des appareils à cristaux liquides ou plasma, mais pour ces deux produits nous faisons seulement des assemblages car les seuls fabricants de briques dans le monde se trouvent en Asie”, déclare M. Bouchama, directeur commercial de Cristor Groupe. Il tient aussi à préciser que ses usines fabriquent des démos de qualité et s’ils sont flashés de manière frauduleuse, leur groupe n’en est nullement responsable. “Nos produits sortent de nos usines sans aucune autre option que celle de revoir les programmes gratuits ou payants mais avec une carte destinée à cela”, précise M. Amokrane. Candor est une autre marque dont les usines se trouvent aussi à Bordj Bou-Arréridj. Spécialisé dans l’industrie électronique, il dispose lui aussi d’un bureau développement qui réalise des recherches sur le volet hard, à savoir la construction des appareils avec ses propres pièces. Les responsables de ce groupe se targuent, pour leur part, d’avoir conçu la première carte mère algérienne. “Nous sommes les premiers en Afrique et dans le monde arabe à avoir réalisé une carte mère pour récepteur numérique et ce, avec nos propres moyens, car nous sommes les pionniers de l’insertion des pièces sur une carte nue”, affirme Benkhrouf Yacine, responsable marketing de Candor Groupe. La réalisation de la carte mère a nécessité un transfert de technologie accordé par la firme américaine Universal qui se trouve être le fournisseur des systèmes de sécurité informatique du Pentagone. Cette maîtrise technologique acquise, le groupe Candor se lance alors dans le perfectionnement continuel de ses produits en les dotant d’options modernes, comme la capacité de déchiffrer automatiquement les nouveaux codes des fournisseurs d’accès aux chaînes de télévision. Bien entendu, cette fois aussi les responsables du groupe se lavent les mains du problème de piratage, car affirment-ils : “Nos usines viennent d’obtenir la certification ISO 9001 version 2000. Nous sommes obligés de produire des appareils de qualité et, bien entendu, ils sortent de chez nous sans aucun flash frauduleux.” Pour faciliter la tâche des utilisateurs, les nouveaux démos de Candor disposent de l’option flash-disc qui permet des mises à jour faciles, ne nécessitant pas obligatoirement de transporter l’appareil jusqu’au magasin d’un spécialiste. Pour le moment, le haut de gamme des démos de Candor reste le modèle 5000 PVR2 qui se singularise par des capacités d’enregistrement énormes, jusqu’à quatre jours sur un disque de 160 giga octet. En plus du transfert technologique, le P-DG de Candor, Abderrahmane Benhamadi, aborde le volet création d’emploi. “Pour le moment, nous employons 870 travailleurs permanents dont un nombre important d’universitaires.” Candor produit aussi des téléviseurs à tube cathodique et assemble des écrans à cristaux liquides et plasma. Space est un autre groupe spécialisé dans la fabrication des démos et des téléviseurs. Groupe relativement jeune, ses responsables mettent les bouchées doubles pour rattraper leur retard. Après une première phase de production, le groupe est en phase de restructuration et des travaux d’agrandissement et de modernisation des équipements sont en cours. Pour bien se placer sur le marché de l’électronique, les responsables de Space vont lancer une nouvelle gamme de démos. Le directeur commercial du groupe insiste sur le fait que les récepteurs Space sont très demandés par le consommateur algérien. Ce groupe est parvenu lui aussi à un bon taux d’intégration puisque les insertions de pièces sont réalisées dans ses usines. Cette même entreprise fabrique aussi des téléviseurs à tube cathodique, à cristaux liquides et plasma.
Lun 9 Avr - 1:52