Le milliardaire et opposant russe réfugié à Londres déclare dans The Guardian préparer la chute du président Poutine et de son régime. Une provocation sans précédent qui fait réagir le Kremlin et la classe politique moscovite."Je prépare une nouvelle révolution russe". De son exil londonien, le milliardaire Boris Berezovski, 61 ans, a fait des déclarations fracassantes au Guardian qui lui a consacré son grand titre de une le 13 avril 2007. Au quotidien britannique, l'ex-oligarque devenu un farouche opposant au Kremlin, souligne qu'"il est impossible de changer le régime de Poutine par la voie démocratique. Il n'y aura pas de changement sans recours à la force", assure-t-il. Dans cette perspective, Berezovski fait état de "contacts en Russie" (sans dévoiler leur identité pour leur "sécurité"), et de "membres de l'élite politique russe" auxquels il offre "son expérience et sa réflexion". Et surtout son soutien financier.
Présenté par
The Guardian comme un "ennemi d'Etat", Boris Berezovski fait depuis longtemps figure de bête noire du régime de Vladimir Poutine qu'il a pourtant soutenu lors de la succession au président Eltsine en 1999. Mais à l'instar d'autres anciens puissants oligarques des années 1990, il s'est résigné à l'exil pour échapper à la reprise en main de l'économie russe opérée par le régime poutinien.
Moscou a immédiatement réagi aux derniers propos de Berezovski. Pour le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov, ils représentent "un crime" et justifieraient la privation du statut de réfugié politique dont bénéficie Berezovski au Royaume-Uni, rapporte
The Guardian. L'an dernier, Londres avait mis en garde en ce sens Berezovski pour ses déclarations particulièrement virulentes contre le régime de Poutine sur une radio moscovite. Mais le milliardaire est convaincu que cela ne peut pas lui arriver depuis l'affaire Litvinenko, l'ex-espion russe mort au Royaume-Uni en novembre 2006 à la suite d'un empoisonnement au polonium. Rapportant l'article du
Guardian, le quotidien électronique russe Gazeta.ru rappelle d'ailleurs que le Parquet de Russie a tenté à deux reprises d'extrader Boris Berezovski, en vain.
Mais à Moscou, le Kremlin n'est pas seul à réagir. Le leader communiste russe Guennadi Ziouganov affiche son désaccord total avec les propos de l'exilé. "Monsieur Berezovski a aidé le pouvoir précédent à piller le pays et maintenant il est soudainement devenu un révolutionnaire. Cela ne marchera pas, les masses ne le suivront jamais", déclare-t-il par l'intermédiaire du journal moscovite Gazeta
. En outre, le chef de l'opposition communiste à la Douma, la Chambre basse du Parlement, affirme qu'en Russie "le cours des choses peut être changé par la voie pacifique, par des manifestations non violentes, massives et efficaces des travailleurs". A cet égard, samedi 14 avril, les communistes devaient descendre dans les rues de Moscou pour une manifestation avec les autres fractions de l'opposition russe, des nationaux-bolchéviques aux libéraux.
L'ultranationaliste Vladimir Jirinovski, vice-président de la Douma, estime que Berezovski "est capable de préparer la révolution", rapporte le même quotidien. "Il entraîne des gens, donne de l'argent et, aujourd'hui, avec Internet, Berezovski peut depuis Londres faire comme s'il était dans son quartier général à Moscou." Le chef populiste du LDPR (parti libéral-nationaliste) ajoute que "chaque année, des députés russes sont invités à Londres. Le Parlement britannique convoque l'opposition pour donner des instructions."
Philippe Randrianarimanana